mardi 21 juin 2016

Communiqué de l'observatoire de la discrimination et de la répression syndicales

L’Observatoire de la Discrimination et de la Répression Syndicales a été mis en place en 2012, à l’initiative de la Fondation Copernic et de plusieurs organisations syndicales, pour mettre au jour et dénoncer toutes les attaques aux libertés d’expression des syndicalistes et des salarié-e-s au sein du monde du travail.
Les propos tenus dernièrement par le Premier Ministre et le Président de la République, reprenant ceux du Medef, visant à criminaliser le mouvement syndical en l’assimilant à un mouvement terroriste, constituent un pas supplémentaire insupportable dans la dérive autoritaire d’un gouvernement qui n’accepte pas que son projet de Loi travail soit repoussé par plus de six Français-es sur dix (sondage L’express du 16 06 2016).
Non content de rendre responsables des débordements les organisations syndicales qui ne font qu’exercer leur droit démocratique à exprimer ensemble leur refus d’une loi socialement régressive, celui-ci se propose maintenant de remettre en cause un des droits historiques du mouvement ouvrier, celui de manifester. Ces déclarations constituent une atteinte grave aux libertés publiques. Elles portent atteinte à des droits garantis par notre constitution et reconnus par le Droit européen (notamment la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH), dont la France est signataire).
L’ensemble des sept organisations syndicales qui sont à l’initiative des manifestations contre la loi travail ont condamné les violences qui ont émaillé les abords de la manifestation. Soutenir que ces organisations sont responsables de ces violences, alors que leur responsabilité ne peut être engagée au plan juridique pour des débordements qui ne sont pas de leur fait, le maintien de l’ordre étant de la responsabilité du gouvernement, est une atteinte à la liberté d’expression et de manifestation.
C’est pourquoi l’Observatoire de la Discrimination et de la Répression Syndicales dénonce les attaques du gouvernement contre les organisations syndicales. Il condamne toutes les atteintes contre le droit des salarié-e-s à se syndiquer et à manifester leur opinion que ce soit dans l’entreprise ou dans la rue. Il appelle à refuser toute remise en question du droit à se mobiliser et à manifester. Il en va du droit à la démocratie sociale dans notre pays.
Paris, le 17 06 2016

mercredi 15 juin 2016

Témoignage après la manifestation du 14 juin à Paris.



Aux Gobelins, les rangs sont très serrés. La manif part. Le cortège de tête est très vite chargé.
Un jeune se fait choper. On essaie d’intervenir à plusieurs pour calmer le jeu et essayer de le récupérer. Un CRS finit par me dire laissez-nous faire notre travail. C’est alors qu’un homme un peu âgé surgit sur la chaussée la tête en sang encadré de CRS. Je demande alors au CRS si c’est ça son travail ?
Les CRS menottent le blessé qui est emmené sur le trottoir. On proteste, on crie. Il est assis par terre. On demande qu’ils appellent les pompiers.
Puis succession de charges : à gauche, à droite, à gauche, à droite. Les CRS entrent dans la manif en hurlant, les matraques au clair. Des gens tombent. Parfois, on arrive à dégager la chaussée des CRS à coups de « cassez vous ». Parfois on court après eux pour essayer d’empêcher une arrestation.
A un moment, ils relèvent sans ménagement des jeunes filles qui sont assises sur le trottoir. Je finis par comprendre qu’une d’elle est blessée à la tête. Ils les encerclent.
C’est alors qu’un médic me dit qu’ils ne soignent que des blessures au crâne. Les flics cognent très fort et en priorité sur la tête. Beaucoup de gens à la fin de la manif avec des bandages en effet... Je me dis alors qu’ il faut que je vienne désormais casquée. Ce qu’il me conseille vivement, me montrant une partie de son casque enfoncée par un coup de matraque. Heureusement en effet qu’il avait son casque...
On repart après une énième charge. Les rangs sont un peu clairsemés quand une grenade lacrymogène arrive de derrière nous en rase motte et passe entre les jambes d’un manifestant devant nous.
Il s’affale de tout son long face contre terre et alors, l’horreur a lieu : en tombant, il coince la grenade en feu entre son cou et le bitume. Trois quatre personnes se précipitent sur lui pour dégager le fumigène. Le gars ne bouge plus. Nous l’entourons nombreux et appelons les médics et les secours. Nous sommes très nombreux autour à ce moment là et les CRS chargent à nouveau sur nous pour nous dégager et prendre position autour du blessé. C’est alors que collectivement, sans nous parler, pensant à nos très nombreux blessés qui se sont vus mis en examen et aussi hélas à Romain D., nous nous battons contre les CRS pour qu’on puisse continuer de nous en occuper et qu’ils dégagent. On y arrive ; ils dégagent, mais dans la bataille, ils ont blessé deux autres manifestants qui sont à terre juste à côté du grand blessé. Une pluie de lacrymos continue de nous atteindre. C’est l’enfer. On crie pour qu’ils arrêtent. Un grand cercle se forme autour des blessés. On porte secours aux trois blessés, dont un se relève déjà et on asperge les medics de maalox parce que les gaz sont violents.
Les pompiers vont enfin arriver mais on insiste pour chacun soit accompagné dans le fourgon par une personne et ils le seront. Quelques applaudissements saluent nos deux blessés, histoire de se donner un peu de chaleur et de soutien...
On repart. Nouvelles charges. Le camion à eau fait son entrée et asperge les manifestants qui sont un peu en contrebas.
On repart, toujours dans les gaz et les grenades de désencerclement. Toujours régulièrement chargés.
Arrivés à hauteur de l’hôpital des Invalides, on s’assoit sur des barres qui servent de parking pour les deux roues. On se repose en se disant qu’on va repartir un peu en arrière rejoindre le cortège syndical.
C’est alors qu’une ligne de CRS arrive au loin, contenant la progression de la manif. Nous sommes sommés de nous lever et on repart alors avec cette deuxième tête de cortège : deux rangées de CRS nous faisant face et nous empêchant de progresser. On arrive comme ça à Invalides.
Puis le camion à eau asperge la place déjà engloutie sous les lacrymos.
J’essaie de revenir en arrière pour retrouver mon compagnon. J’arrive au même parking à motos et je vois juste un peu plus loin, un double cordon de CRS qui bloque la manif. Je comprends alors qu’ils veulent dégager la place avant de nous laisser arriver.
Nous sommes alors violemment chargé.e.s et gazé.e.s. Ca pleut de partout. Un manifestant me rince les yeux avec du sérum. Je ne vois plus rien. Les cortèges syndicaux tournent dans une rue perpendiculaire pour échapper au déluge. Un SO se fait charger et gaze à son tour les CRS. Je reste sur l’axe principal et c’est alors que dans une brume compacte je vois un manifestant sur le côté avec un trou dans la cuisse et qui saigne. Des gens le secourent. Un peu plus loin, même scène : un gros trou dans la cuisse et ça saigne beaucoup. Je me mets autour du gars secouru par plusieurs personnes car les lacrymos pleuvent et je crains une charge avec le gars à terre. Ses amis décident de le porter plus loin en arrière car on n’arrive plus à respirer. Je distribue des pulvérisations de maalox jusqu’à ce épuisement. Je n’arrive plus à secourir et soulager...
J’ai des camarades qui sont là, je leur donne le nom et le tèl d’une avocate militante. Puis je remonte encore vers l’arrière car il est impossible d’avancer ; des camions coupent désormais la route derrière les CRS.
C’est alors qu’un copain de Nuit Debout me voit et me demande de l’aide pour un gars qui est très blessé et les secours n’arrivent pas. Le gars est couché dans l’entrée du monceau fleurs fermé. Il a pris une grenade de désencerclement dans l’entre-jambes. Il est brûlé sur toute cette zone, son pantalon est en lambeaux et il souffre beaucoup.
Les pompiers arrivent une heure après le premier coup de tél. c’est très long, beaucoup trop long, quand on voit la violence avec laquelle nous sommes chargé.e.s, gazés, visés au flash ball et aux grenades.
Je repars avec mon compagnon, mon fils et quelques camarades en direction de Montparnasse. Mon fils s’est pris un coup de matraque sur la tempe, mon compagnon s’est battu avec les flics en civils mais nous n’avons rien de grave compte tenu des blessures que les CRS ont encore provoquées ce jour.
Le cortège n’a encore pas pu arriver à son terme. Le défilé a été interrompu. Mais nous étions des centaines de milliers dans la rue, tou-te-s très uni.e.s, personne ne reprochant rien à quiconque. Conscient.e.s de l’adversité que nous affrontons et qui nous soude. Le cortège de tête était encore plus massif, toujours aussi déterminé et extrêmement attentif les un.e.s aux autres.
Les cortèges syndicaux ont pris aussi beaucoup de violences policières.
Mais ce soir, malgré tout ça, nous restons invincibles, car nous ne pouvons pas perdre. Ou plutôt nous ne méritons pas de perdre. Nous préparons déjà demain et les jours suivants.
Jusqu’à la victoire.
Une manifestante, syndicaliste et Debout.

mercredi 1 juin 2016

Communiqué de Presse sur l’affaire du Bagelstein de Rennes

"J’en ai marre de ces gays-là !" "Il existe trois catégories de femmes : les putes, les salopes et les emmerdeuses." "Donne pouffe en bon état. A peine utilisée. Peu de conversation." "Il se cogne l’orteil contre sa table basse et s’écrie Allah Akbar !"

Quatre rennais-e-s atterré-e-s par la publicité violemment sexiste, homophobe et raciste diffusée par l’enseigne Bagelstein située place Hoche, ont pris l’initiative d’aller discuter avec le gérant. La situation a dégénéré : ce dernier les a accueilli à coup de menaces verbales et physiques. Le commerçant a saisi l’un de ses interlocuteurs. Ce dernier a tenté de se défendre avant de se retrouver plaqué au sol par le commerçant. Ses camarades ont tenté de le dégager. La BAC, présente aux abords, les a tous interpellés à ce moment-là. Selon le témoignage des policiers, le gérant tenait effectivement le camarade au sol au moment de leur intervention.

Sous la pression conjointe de la police et des avocats, tou-te-s les gardé-e-s à vue ont accepté la comparution immédiate, qui comme à l’habitude s’est soldée par des peines hors de mesure. Sans défense de qualité, la justice d’abattage a donc prononcé des peines allant de 1 à 3 mois de prison ferme pour une simple empoignade, et ce alors même que tous les casiers étaient vierges. Le gérant quant à lui, non-content de n’avoir pas été blessé a été indemnisé à hauteur de 1100 euros. Le racisme, le sexisme et l’homophobie, en 2016 ça rapporte un bon 13ème mois !

L’union Locale CNT 35, tardivement informée, n’a pas eu la possibilité d’intervenir en faveur de son adhérent. Elle n’a donc pas pu s’interposer entre une machine judiciaire profondément répressive et de jeunes étudiante-s soumis-e-s à une pression considérable.
La CNT condamne fermement une justice qui comme à l’habitude protège les oppresseurs et enferme des camarades légitimement indigné-e-s par des propos qui tombent sous le coup de la Loi.

Elle affirme qu’elle interviendra par tous les moyens à sa disposition en faveur des condamné-e-s, qu’ils soient adhérents de son Union Locale ou non. Des contacts avec l’avocat du syndicat ont déjà été pris en vu d’un appel de cette condamnation détestable.

Elle n’oublie pas une fois une fois de plus de décerner la médaille du mérite à Ouest-France, qui dans ses articles à éhontément menti pour salir nos camarades.

L’Union Locale CNT 35
Le 1er Juin 2016